Entrepreneur individuel : un nouveau statut plus protecteur
Par principe, l’entrepreneur individuel aime la simplicité administrative. Pourtant, pour protéger son patrimoine personnel, il fallait jusqu’à présent créer une EIRL (entreprise individuelle à responsabilité limitée) qui se révélait parfois complexe en pratique. La loi du 14 février 2022 change la donne : désormais un statut unique d’entreprise individuelle existe et protège le patrimoine personnel de l’entrepreneur.
La nouvelle entreprise individuelle unique
Toute personne physique qui exerce en son nom propre une activité professionnelle peut être qualifiée d’entrepreneur individuel. L’article L 526-22 du Code de commerce donne cette définition de l’entreprise individuelle, qui vise aussi bien les commerçants, les artisans, les agriculteurs que les professions libérales.
La loi n°2022-172 du 14 février 2022 crée le statut unique d’entreprise individuelle. Il s’agissait de concilier protection du patrimoine et simplicité. A défaut de créer une société, personne morale distincte de l’entrepreneur, les patrimoines personnels et professionnels sont confondus. La création d’une société unipersonnelle, EURL (entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée) ou SASU (société par actions simplifiée unipersonnelle), engendre des formalités et des coûts que certains créateurs d’entreprise ne souhaitent pas engager. L’EIRL nécessitait l’affectation d’éléments spécifiques à l’activité professionnelle.
Désormais, les biens utiles à l’activité professionnelle sont automatiquement séparés du patrimoine personnel. Les créanciers de l’entrepreneur individuel ne pourront y accéder, sauf renonciation expresse de leur débiteur.
La disposition s’applique depuis le 15 mai 2022, pour toutes les créances nées depuis cette date, y compris pour les entreprises créées auparavant. Le décret n° 2022-725 du 28 avril 2022 prévoit les modalités de distinction des patrimoines personnels et professionnels.
Comment distinguer patrimoine personnel et patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel ?
Le patrimoine professionnel est constitué de tous les biens, droits, obligations et sûretés utiles à l’entrepreneur individuel. Tous les autres biens relèvent du patrimoine personnel. Nul besoin d’une déclaration d’affectation ni d’un état descriptif. La distinction va donc bien au-delà de la seule protection de la résidence principale qui était automatique jusqu’à présent.
Le critère d’utilité est donc le seul permettant de savoir dans quel patrimoine se classe un élément. En pratique, cela peut poser des difficultés pour les biens mixtes (voiture utilisée à des fins personnelles et professionnelles, ordinateur, etc.). Il en est de même pour l’argent en numéraire dans la mesure où l’obligation de détenir un compte bancaire séparé n’est uniquement requise pour les EIRL, les commerçants et les micro-entrepreneurs dont le chiffre d’affaires dépasse 10 000 euros. Le nouvel article R 526-26 du Code de commerce n’apporte pas tous les éclaircissements nécessaires. Faites le point avec un expert-comptable lors de la création de votre entreprise individuelle.
Les droits des créanciers dans l’entreprise individuelle unique
La distinction des patrimoines prive l’entrepreneur individuel de se porter caution d’une dette dont il serait en même temps le débiteur principal. Les créanciers pourront malgré tout obtenir un autre type de sûreté que le cautionnement. Des règles spécifiques s’appliqueront en cas de procédures collectives de l’entreprise individuelle.
Pour les créanciers, la création de la nouvelle entreprise individuelle est donc une mauvaise nouvelle. Leur droit de gage général sur l’ensemble du patrimoine n’existe plus. Les créanciers vont sans doute exiger de nouvelles garanties en échange.